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Maladie parodontale et santé

MALADIE PARODONTALE ET SANTÉ

Par le Dr Catherine Rossi

 

Les derniers sondages confirment qu’il y a une méconnaissance totale de la maladie parodontale dans la population. Beaucoup de patients qui saignent tous les jours des gencives pensent que c’est normal. Selon un sondage de l’UFSBD (Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire), 50 % de la population saigne des gencives et seulement 9 % d’entre eux en font un motif de consultation pour aller voir leur chirurgien-dentiste.

 

UN BESOIN D’INFORMATION

91% des personnes saignant des gencives ne sont donc jamais allés consulter un dentiste pour cette raison. Si bien qu’aujourd’hui 50 % des européens tous âges confondus seraient atteints d’une maladie parodontale et on passe à 70 à 85 % chez les personnes au-delà de 65 ans dont 10 % présentent une phase sévère c’est-à-dire qu’ils sont au stade 4 de la maladie qui les amène à l’édentation. L’enquête a également montré que 46 % des français ne savaient même pas qu’il existait une maladie parodontale. Donc l’association : saignement de gencives = maladie parodontale n’est pas faite chez une personne sur deux. Il semblerait même que de nombreux thérapeutes, même des médecins ne soient pas au courant de cela.

Les chercheurs estiment que c’est une vraie pandémie, surtout que depuis 2006, la Sécurité Sociale a retiré tout remboursement sur ces soins. Les finances devenant ainsi un prétexte supplémentaire pour ne pas se faire soigner. Même avec la grande campagne gouvernementale de 2018 sur les prothèses dentaires gratuites, rien n’a été mis en place pour le traitement des gencives. C’est comme si on vous construisait une maison gratuitement sur des marécages. Certaines mutuelles octroient un forfait parodontal annuel, mais souvent ridicule par rapport aux besoins réels. L’information des populations est quasi inexistante et malheureusement, même encore beaucoup de dentistes aujourd’hui passent à côté du diagnostic d’une maladie parodontale.

 

DECOUVERTES SCIENTIFIQUES

En dehors de l’évidence que, lorsque l’on fait soigner ses gencives, on sauve ses dents, la recherche scientifique a mis en évidence, depuis quelques années, l’influence majeure des bactéries d’origine parodontales dans toute une série de maladies générales, dont certaines, vous le verrez, sont des plus surprenantes. Vous allez donc voir qu’il est donc devenu une évidence qu’en soignant les gencives de nos patients et en les gardant en bonne santé on sauve leur vie !

La gencive est un émonctoire, elle tente d’éliminer les toxines du corps et comme une peau transpirante, acnéique et eczémateuse, les gencives développent une inflammation, voire une suppuration, pour éliminer des toxines, même en l’absence de plaque bactérienne.

Un état inflammatoire chronique entraine au fil des mois un épuisement immunitaire et le lieu d’infection chronique devient un pourvoyeur de toxines qui vont se disséminer dans tout l’organisme déjà bien affaibli par un métabolisme et des défenses immunitaires épuisées.

Vous comprendrez pourquoi, dans de telles circonstances, il est inutile d’engager un traitement parodontal local, sans reconsidérer la globalité de l’hygiène de vie de son patient. Si la cause n’est pas traitée, la récidive sera permanente et sans issue.

On sait depuis longtemps que le diabète peut faire apparaitre une maladie parodontale ou aggraver une maladie parodontale déjà existante, mais on vient de découvrir que par effet de feedback une maladie parodontale non stabilisée va aggraver le diabète. Elle va même être à l’origine de complications du diabète notamment des complications rénales. Des études ont montré qu’un traitement parodontal chez un diabétique diminuait de 21 % le risque de mortalité.

En juillet 2018, l’INSERM a publié un dossier complet sur toutes les recherches qu’ils ont réalisées sur les liens entre les maladies parodontales et l’apparition de pathologies générales. Les résultats sont des plus surprenants : https://fr.calameo.com/read/005154450616c517dbd2a

 

MALADIE LOCALE AVEC CONSÉQUENCES GLOBALES

Les bactéries présentes dans les poches parodontales peuvent donc contribuer à une augmentation de la glycémie et de l’insulino résistance. Mais la bonne nouvelle est que la prise en charge de la maladie parodontale chez une personne diabétique permettait au bout de 6 mois une réduction nettement significative de la glycémie ainsi que des paramètres du stress oxydatif.

En ce qui concerne les maladies cardiovasculaires, cela fait très longtemps que l’on connait le lien entre les bactéries d’origine buccale et les risques d’endocardite. D’ailleurs certaines personnes ne peuvent subir des soins dentaires sans couverture antibiotique sur prescription du cardiologue. Mais des études récentes montrent que l’on va bien plus loin que l’endocardite. La maladie parodontale augmente de manière significative le risque d’avoir un infarctus du myocarde. On retrouve de l’ADN bactérien d’origine buccal dans les tissus cardiaques, les plaques d’athérome, les carotides, les coronaires et également sur l’aorte.

Aux États Unis, les sociétés de parodontologie et de cardiologie s’unissent pour mettre en place un plan d’action de prévention des maladies cardiovasculaires. Ils ont estimé qu’un traitement parodontal diminuerait de 14 % le risque de mortalité par infarctus, (travaux publiés par l’association américaine de cardiologie).

Concernant une autre spécialité, il est établi depuis longtemps que les infections dentaires peuvent provoquer des rhumatismes articulaires aigus. La rhumatologie aujourd’hui est de plus en plus précise et des recherches ont en effet montré que la bactérie appelée porphyromonas gingivalis, que l’on retrouve dans les poches parodontales, transforme dans les articulations les résidus d’arginine, (qui est un acide aminé), en citrulline. La citrulline est une protéine que l’on retrouve dans les articulations des patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde. La citrulline est une des causes de l’inflammation au niveau articulaire et cette inflammation est à l’origine de la détérioration des cartilages et des articulations.

Des études ont montré que la prise en charge non chirurgicale de la maladie parodontale permettait de réduire grandement les symptômes et l’évolution de la polyarthrite rhumatoïde.

En ce qui concerne l’obésité que l’on pourrait considérer comme les prémices d’un syndrome métabolique, nous retrouvons les mêmes facteurs hépatiques et intestinaux, comme agent déclenchant ou aggravant d’une parodontopathie. Par contre les chercheurs ont également mis en évidence que les bactéries responsables de la parodontopathie comme porphyromonas gingivalis ou aggregatibacter actinomyces comitans, ou leurs débris, peuvent passer du parodonte malade dans la circulation sanguine et aller agir au niveau de la cellule graisseuse, c’est-à-dire l’adipocyte. Les bactéries stimuleraient les défenses immunitaires, lesquelles, pour s’en débarrasser, déclencheraient une inflammation chronique et au final cette dernière favoriserait le stockage des graisses et en tout cas rendrait difficile la perte de poids.

 

MALADIE LOCALE AU RISQUE MORTEL

Autre domaine dans lequel on ne s’attendait pas à trouver un lien avec les maladies parodontales, c’est la femme enceinte qui présente un risque accru d’accouchement prématuré si elle a une maladie parodontale avancée. On constate actuellement qu’un tiers des accouchements prématurés surviennent sans cause identifiée. C’est ce que constate Marie Laure Colombier, chercheuse à l’INSERM, qui a travaillé sur ce sujet. Ces travaux ont mis en évidence que les bactéries présentes dans les poches parodontales favorisaient une hypertension artérielle ainsi que la présence de protéine dans les urines, c’est ce que l’on appelle la préclampsie, à l’origine d’accouchement prématuré. Ces études ont montré que des futures mères présentant une parodontite avaient 3 fois plus de risque d’accoucher avant terme. D’autres études aux États Unis ont même montré que ce risque était multiplié par 7.

Mais ce n’est pas fini ! A la vue de ces connaissances, les chercheurs se sont mis à regarder les pathologies d’une manière un peu différente, et c’est ainsi qu’ils ont découvert, à leur plus grande surprise, des bactéries ou des ADN bactériens en provenance des poches parodontales dans des sites infectés au niveau du cerveau chez des malades décédés atteints d’AVC, d’Alzheimer et de démences.

Encore plus surprenant, on a retrouvé également des cellules d’origine parodontale dans les tumeurs cancéreuses du pancréas, du cancer du sein, du cancer de l’estomac, même si cette dernière localisation semble plus logique.

Dans la même lignée, de nombreuses pneumopathies, surtout chez les personnes âgées, auraient pour origine une maladie parodontale, les bactéries étant avalées et inhalées.

Certaines pathologies rénales et cutanées (psoriasis) ont également été supposées d’origine parodontale.

 

EN CONCLUSION

La maladie parodontale est très frustrante autant pour les chirurgiens-dentistes que pour les patients. Les traitements sont longs et coûteux, les soins quotidiens d’hygiène contraignants et rarement bien exécutés, ce qui explique les difficultés de cicatrisation et les besoins de contrôle réguliers.

Il est de notre devoir d’informer nos patients des conséquences d’une négligence autant de soins que d’entretien. On sait maintenant que ça peut sauver leur vie !

Dr Catherine Rossi

 

> Téléchargez le document d’information pour vos patients : MALADIE-PARODONTALE-VOTRE-SANTE-EN-DANGER

Commentaire (1)

  1. Répondre
    Danielle Dumonteil says:

    Bravo Catherine bon résumé des dernières connaissances en médecine systémique. Le document va m’éviter De répéter chaque jour les mêmes choses en boucle! J’ajoute qu’il ne me vient pas à l’idée de travailler en bouche sans traiter le terrain et les erreurs de comportements et d’hygiène de vie de mes patients pour rompre la boucle infernale parodontopathies -maladies systémiques. Les médecins méconnaissent la plupart du temps ces liens et n’ont pas le temps de s’en préoccuper ! Danielle Dumonteil

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